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   Retrouver MD dans "Marguerite et moi" de Fatima Soualhia-Manet

      par Jean Pierre Ceton

Dans son « Marguerite et moi », Fatima Soualhia-Manet nous donne étonnamment le plaisir émouvant de retrouver MD présente dans sa vérité et « sur » le plateau !

Pourtant on en a déjà vu des actrices avec le verre de scotch à la main, la gauloise dans l'autre, et la tenue « Tati rive gauche » sans que Duras soit là, sauf dans une caricature désolante.

Oui on en a déjà vu des comédiennes évoluant dans des décors durassiens surchargés sans que ça n'y change rien qu'ils soient durassiens.

Ici à travers des extraits d'entretiens, parmi ceux nombreux que Duras a donné tout au long de sa vie d’écrivain, surgissent des interventions connues ou moins connues, balançant entre le plus léger et le plus dense. De sa citation des blagues qui la font tant rire à la dénonciation du simplisme comme fascisme, ou plutôt, inversement, du fascisme comme simplisme ! De son rejet des partis politiques officiels à sa plainte concernant sa vie d’écrivain : « Je ne vis pas... j'écris dans un bain d'alcool...»

Ici, dans un décor minimal, oui à de nombreux moments on écoute et voit Fatima, et on entend et voit Duras. Phénomène d'identification ? Elle dit : « je l'aime beaucoup Duras ».

Le remarquable c'est que tout le long du spectacle on reconnaît les intonations de Duras, on la voit indépendamment des passages cités, dans ses modulations de voix, ses petits gestes qui ne sont pas que des tics ou des manies, et dans sa gestuelle multiple, qui dévoilent que Duras c'était de l'écriture tout le temps !

Son partenaire Christophe Casamance joue son rôle d'intervieweur sans chercher à être plus journaliste que les journalistes anti-durassiens, ni à « se faire plus bête qu'il est », comme elle avait dit à Pivot.

A des moments on pourrait craindre à force de tant d'identifications que Duras en sortirait un peu ridiculisée. Non pas qu'elle force le ton, Fatima, elle ne le force jamais, mais que Duras sans gêne s'expose, puisqu’elle n'a « pas de pudeur » comme elle disait.

Au final, au contraire, le personnage est renforcé, ce personnage au fond si fort et si touchant qu'on a été tant à tellement aimer. Et que tant de gens continuent à découvrir et à aimer.

D'ailleurs si on y avait reçu sa caricature, on se serait demandé une fois de plus pourquoi alors on l'avait tant aimée !


« Marguerite et moi » repris ce 21 et 22 mai au Théâtre de la Villette


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22/5/2015 / tous droits réservés / texte reproductible sur demande / m. à j.  1/8/2015
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